La culture des Berbères marocains : un défi à relever

L’Afrique du Nord est l’une des régions les plus diverses du continent sur le plan culturel et ethnique. Des siècles d’invasions, de colonisation et de domination étrangère ont façonné l’identité de la région et son patrimoine culturel. Les colonisateurs avaient des origines culturelles et des identités ethniques différentes. Les origines culturelles et les identités ethniques romaines, byzantines, arabes et européennes ont toutes été absorbées dans l’Afrique du Nord que nous connaissons aujourd’hui. Mais malgré les changements induits par la présence étrangère, la culture indigène de la région reste présente au sein des sociétés.

Les Berbères ou les « Amazigh » sont communément considérés comme la population d’origine qui a habité la région. De Siwa, dans le sud-ouest de l’Égypte, aux rives de l’océan Atlantique au Maroc, les Berbères existent en tant qu’ethnie avec leur propre héritage culturel et leurs traditions. Le Maroc, en particulier, compte un nombre important de citoyens d’origine berbère, mais il n’existe pas de statistiques officielles indiquant leur pourcentage exact dans la population globale. Sur le plan social, les Amazighs sont organisés en clans ou en tribus, en fonction de leur situation géographique.

Il est très remarquable que les tribus berbères du Maroc vivent dans des régions éloignées, rurales et montagneuses. Les tribus peuvent être divisées en trois groupes selon la région où elles vivent : les « Rifans » du Nord, les « Shlu » du Sud-Est et les « Berbères » du Sahara. La décision et le désir de vivre dans les régions périphériques du pays remontent à la domination arabe qui a régné sur le Maroc au 7e siècle.

Lorsque les Arabes ont envahi l’Afrique du Nord au VIIe siècle, ils ont mis en œuvre une politique d' »arabisation », visant à diffuser la culture arabe et à transformer la culture déjà existante. À cet égard, les Arabes se sont principalement appuyés sur la langue et la religion comme outils de changement des identités culturelles afin d’instiller davantage la domination arabe.

Au Maroc, le processus d’arabisation s’est déroulé dans les villes centrales et les régions côtières. Afin de préserver leur propre culture, les Berbères du Maroc de l’époque se sont retirés du centre et ont habité des régions périphériques comme les montagnes et le Sahara. Ce processus de délocalisation a permis de préserver la culture berbère pendant des siècles, mais il a eu un prix. Le retrait du centre est devenu au fil des ans une raison de la marginalisation du peuple berbère, ce qui a créé une dimension politique à la question globale de l’amazighité.

 

L’identité régionale est une dimension importante dans la culture amazighe, principalement parce qu’elle est liée au concept de connexion à la terre ou « Tammurt », qui est un concept déterminant dans la culture berbère. Les deux autres dimensions qui définissent la culture amazighe au Maroc sont l’importance de la parenté à travers la solidarité tribale et la signification de la langue comme source d’identité. Certains affirment que ces concepts définissent l’identité marocaine en général. Ces caractéristiques aident non seulement les Berbères à coexister avec diverses identités culturelles, mais elles influencent également les autres. Toutefois, ces concepts restent plus spécifiques et plus importants pour les Berbères.

Il est en effet très difficile de comprendre l’essence de la culture berbère sans d’abord comprendre ce triangle de terre, de langue et de tribu. En fait, c’est ce même triangle qui a contribué à préserver la culture au fil des ans, et il se reflète également dans les diverses habitudes culturelles des tribus amazighes.

Par exemple, la musique traditionnelle amazighe est jouée sur un instrument à cordes en bois qui est essentiellement fabriqué à partir des rares ressources disponibles dans les zones rurales ou montagneuses. Le lien avec la terre comme terme d’identité a permis à la culture berbère de s’adapter à son environnement malgré la rareté des ressources disponibles. De même, l’importance de la parenté et de la solidarité tribale se manifeste dans les habitudes culturelles. Les mariages berbères, par exemple, se déroulent sur trois jours, et chaque jour a sa signification. Mais l’idée fondatrice de ce long mariage est de célébrer la cohésion tribale qui préservera la culture par le mariage.

Bien que minoritaires et marginalisés depuis de nombreuses années, les Amazighs ont réussi à relever divers défis tout en conservant leur héritage culturel intact.

Craignant que la vie moderne avec toutes ses avancées technologiques ne fasse craindre aux Amazighs de préserver l’histoire et la culture, ils ont donc développé une stratégie d’adaptation qui repose sur le maintien des traditions d’une part, et l’utilisation de la société civile comme outil de pression sur le gouvernement. La préservation de la culture aujourd’hui est devenue une question de politique. Les organisations de la société civile et les partis politiques amazighs s’efforcent d’obtenir davantage de politiques qui contribueraient à préserver la culture et l’histoire, comme l’amendement de la constitution marocaine en 2011 pour inclure le tamazigh (parlé principalement dans le Moyen Atlas, le Haut Atlas central et le Sahara) comme langue nationale.

La clé de la préservation de la culture amazighe au Maroc aujourd’hui est l’institutionnalisation. Le patrimoine, l’histoire et la culture populaire des tribus berbères doivent être mis dans un cadre institutionnel par le biais de différentes organisations qui visent à assurer la coexistence dans la diversité.

 

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